Un salarié protégé peut cumuler une allocation de congé de fin de carrière et le paiement d’heures de délégation

Un salarié protégé peut cumuler une allocation de congé de fin de carrière et le paiement d’heures de délégation

Cour de cassation, chambre sociale, 3 mars 2021, n°19-18.150

  • Un salarié protégé a adhéré en avril 2014 à un dispositif de congé de maintien de l’emploi des salariés séniors et signé un avenant à son contrat prévoyant notamment une dispense totale d’activité.

Parallèlement, il a continué à exercer son mandat, pris des heures de délégation et demandé que certaines soient rémunérées en sus de la rémunération qui lui étaient versées : la Société a refusé au motif que le salarié ne justifiait pas de réunions à l’initiative de l’employeur ou de circonstances exceptionnelles motivant un dépassement du crédit d’heures.

Le salarié a opposé à son employeur que l’utilisation des heures de délégation ne doit pas entrainer de perte de salaire et doivent être payées en plus des heures de travail si elles sont prises hors du temps de travail en raison des nécessités du mandat.

  • La question était donc de savoir s’il est possible de cumuler une rémunération fixée forfaitairement dans le cadre d’une dispense totale d’activité (jusqu’à la retraite) avec tout ou partie du crédit d’heures, si l’employeur n’a pas défini d’horaires de travail (théoriques) permettant de distinguer les heures de délégation inclues dans la rémunération et celles effectuées en sus.
  • En principe, les heures de délégation ne s’ajoutent pas à la rémunération, sauf lorsqu’elles dépassent la durée légale, conventionnelle, ou contractuelle applicable, ce qui, par hypothèse, ne pouvait être le cas ici, puisque le salarié n’exerçait plus aucune activité.

Par ailleurs, dans le cas d’un congé de fin de carrière, d’une cessation anticipée d’activité ou d’un congé de reclassement -qui constituent des hypothèses dans lesquelles le lien contractuel subsiste sans que le salarié n’ait vocation à reprendre une quelconque activité-, il n’est généralement jamais fixé d’horaires théoriques puisque cela n’aurait aucun intérêt pratique.

  • Pour autant, dans une décision du 3 mars 2021, la Cour de cassation a considéré pour la première fois à notre connaissance dans ce type de situation qu’en cas de dispense d’activité, il convient de se référer aux horaires que le salarié aurait dû suivre s’il avait travaillé afin de considérer si ces heures ont été réalisées hors temps de travail résultant du planning, et, le cas échéant, si elles doivent être payées en plus des « heures de travail » théoriques.

Cette décision fait désormais courir un risque de cumul entre le maintien de salaire qui a été convenu dans le cadre du dispositif et la totalité du crédit d’heures, qui ne trouvera de réponse que par l’intégration d’horaires théoriques au sein de chaque dispositif prévoyant la suspension d’activité d’un ou plusieurs salariés protégés.

POUVOIR D’ACTION DE L’EXPERT DU CSE

Le recours de l’expert désigné par un comité d’entreprise (ou CSE) dans le cadre d’un plan de sauvegarde de l’emploi pour obtenir des documents estimés manquants.

Conseil d’Etat 25 septembre 2019 (n°428510)

Le Conseil d’Etat clarifie les voies de recours ouvertes à l’expert du Comité d’Entreprise (désormais Comité Social et Economique) désigné dans le cadre d’une procédure de plan de sauvegarde de l’emploi, lorsqu’un employeur ne lui transmet pas les pièces dont il sollicite la communication.

En l’occurrence, un expert  saisissait  le Tribunal Administratif dans le cadre d’une procédure en référé, pour obtenir la communication des éléments estimés manquants. Par ordonnance du 12 février 2019, le Tribunal Administratif de Montreuil se déclare incompétent pour connaître de cette demande.

Dans son arrêt du 25 septembre 2019, le Conseil d’Etat annule, dans un premier temps, cette ordonnance, estimant que le contentieux initié par l’expert relève bien de la compétence du juge administratif. Dans un second temps, il rejette la demande de l’expert, en s’appuyant sur les articles L.1233-57-5 et L.1235-7-1 du Code du travail, qui prévoient :

  • Pour le premier, que « toute demande tendant, avant transmission de la demande de validation ou d’homologation, à ce qu’il soit enjoint à l’employeur de fournir les éléments d’information relatifs à la procédure en cours ou de se conformer à une règle de procédure prévue par les textes législatifs, les conventions collectives ou un accord collectif est adressée à l’autorité administrative» ;
  • Pour le second, que l’accord collectif ou le document unilatéral portant PSE, le contenu du plan, les décisions prises par l’administration au titre de l’article L. 1233-57-5 précité et la régularité de la procédure de licenciement collectif ne peuvent faire l’objet d’un litige distinct de celui relatif à la décision de validation ou d’homologation du plan.

Le Conseil d’Etat  déduit de la lecture combinée de ces deux textes qu’une demande tendant à ce qu’il soit enjoint à l’employeur de communiquer des pièces à l’expert-comptable désigné ne peut être adressée qu’à l’autorité administrative et ne peut faire l’objet d’un litige distinct du litige relatif à la décision de validation ou d’homologation du plan. Tel n’est pas le cas en l’espèce, puisque l’action de l’expert avait précédé la décision d’homologation ou de validation du plan.

La portée de cette décision  est toutefois limitée au contexte spécifique d’une expertise diligentée dans le cadre d’un projet de licenciement économique avec mise en place d’un PSE.

LA MINISTRE DU TRAVAIL PRECISE LES REGLES APPLICABLES EN CAS DE FUSION D’ENTREPRISES SI SEULE L’ENTREPRISE ABSORBEE A MIS EN PLACE UN CSE

L’article 9, IV, de l’ordonnance n°2017-1386 du 22 septembre 2017 fixe les règles ayant vocation à s’appliquer s’agissant du CSE, en cas de modification de la situation juridique de l’employeur (fusion, scission ou encore cession) en application de l’article L.1224-1 du Code du travail.

Toutefois, cet article ne vise que l’hypothèse où le CSE n’a pas encore été mis en place dans l’entreprise absorbée.

Le sénateur Philippe MOUILLER a donc interrogé la Ministre du travail sur les règles applicables lorsqu’une entreprise disposant d’anciennes institutions représentatives du personnel absorbe une entreprise qui s’est déjà dotée d’un CSE, et que l’entreprise absorbée devient un établissement distinct au sein de l’entreprise absorbante.

A cette occasion, la Ministre du travail a rappelé que l’ordonnance n°2017-1386 a prévu un certain nombre de dispositions permettant de faciliter le passage des anciennes institutions représentatives du personnel vers le CSE, et notamment la possibilité de réduire ou de proroger la durée des mandats, mais qu’en tout état de cause il ne s’agit pas d’une obligation.

Il n’existe donc aucune obligation d’organiser de nouvelles élections au sein de l’entreprise absorbante à l’issue de l’opération de restructuration.

Il est alors possible de :

  • Proroger ou réduire les mandats afin de faciliter la mise en place du CSE. L’ensemble des établissements de l’entreprise absorbante pourra se doter d’un CSE à une date commune, ou de manière échelonnée et au plus tard le 31 décembre 2019.
  • Faire coexister les anciennes institutions représentatives du personnel et le CSE. En pareille hypothèse, durant la période de transition la composition du CSE central et/ou du comité central d’entreprise est adaptée au fur et à mesure de la mise en place des CSE dans les établissements distincts. En pratique, un accord pourra prévoir que les questions intéressant à la fois des établissements dotés de CSE et ceux dotés de CE seront abordées au cours d’une seule et même décision de l’instance centrale.

Ces précisions mettent l’accent sur le fait que le dispositif législatif prévu par les ordonnances constitue avant tout un outil placé au service des entreprises et des partenaires sociaux, à charge pour eux de les adapter aux besoins et spécificités de leurs structures.

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