Un salarié protégé peut cumuler une allocation de congé de fin de carrière et le paiement d’heures de délégation

Un salarié protégé peut cumuler une allocation de congé de fin de carrière et le paiement d’heures de délégation

Cour de cassation, chambre sociale, 3 mars 2021, n°19-18.150

  • Un salarié protégé a adhéré en avril 2014 à un dispositif de congé de maintien de l’emploi des salariés séniors et signé un avenant à son contrat prévoyant notamment une dispense totale d’activité.

Parallèlement, il a continué à exercer son mandat, pris des heures de délégation et demandé que certaines soient rémunérées en sus de la rémunération qui lui étaient versées : la Société a refusé au motif que le salarié ne justifiait pas de réunions à l’initiative de l’employeur ou de circonstances exceptionnelles motivant un dépassement du crédit d’heures.

Le salarié a opposé à son employeur que l’utilisation des heures de délégation ne doit pas entrainer de perte de salaire et doivent être payées en plus des heures de travail si elles sont prises hors du temps de travail en raison des nécessités du mandat.

  • La question était donc de savoir s’il est possible de cumuler une rémunération fixée forfaitairement dans le cadre d’une dispense totale d’activité (jusqu’à la retraite) avec tout ou partie du crédit d’heures, si l’employeur n’a pas défini d’horaires de travail (théoriques) permettant de distinguer les heures de délégation inclues dans la rémunération et celles effectuées en sus.
  • En principe, les heures de délégation ne s’ajoutent pas à la rémunération, sauf lorsqu’elles dépassent la durée légale, conventionnelle, ou contractuelle applicable, ce qui, par hypothèse, ne pouvait être le cas ici, puisque le salarié n’exerçait plus aucune activité.

Par ailleurs, dans le cas d’un congé de fin de carrière, d’une cessation anticipée d’activité ou d’un congé de reclassement -qui constituent des hypothèses dans lesquelles le lien contractuel subsiste sans que le salarié n’ait vocation à reprendre une quelconque activité-, il n’est généralement jamais fixé d’horaires théoriques puisque cela n’aurait aucun intérêt pratique.

  • Pour autant, dans une décision du 3 mars 2021, la Cour de cassation a considéré pour la première fois à notre connaissance dans ce type de situation qu’en cas de dispense d’activité, il convient de se référer aux horaires que le salarié aurait dû suivre s’il avait travaillé afin de considérer si ces heures ont été réalisées hors temps de travail résultant du planning, et, le cas échéant, si elles doivent être payées en plus des « heures de travail » théoriques.

Cette décision fait désormais courir un risque de cumul entre le maintien de salaire qui a été convenu dans le cadre du dispositif et la totalité du crédit d’heures, qui ne trouvera de réponse que par l’intégration d’horaires théoriques au sein de chaque dispositif prévoyant la suspension d’activité d’un ou plusieurs salariés protégés.

Commentaire de l’instruction DGT du 3 novembre 2020

Dans une instruction parue le 3 novembre 2020, la Direction Générale du Travail donne des orientations quant à l’organisation de la poursuite de l’ensemble des missions de l’inspection du travail et la gestion de la crise sanitaire, dans le cadre du nouveau confinement en vigueur depuis le 30 octobre dernier.

Cette instruction indique notamment aux inspections que le recours au télétravail en entreprise « n’est pas une option, mais une obligation pour toutes les activités qui sont réalisables à distance » et que pour les autres activités (notamment les fonctions managériales), l’organisation du travail doit permettre de réduire les déplacements domicile-travail et l’affluence dans les transports en commun par l’adaptation des horaires.

La DGT ajoute que « les contrôles entreprise devront être menés conformément aux missions habituelles du système d’inspection du travail », et devraient donc se poursuivre normalement. Dans l’hypothèse où l’inspection serait saisie de difficultés d’application des mesures de prévention des risques, telles que préconisées notamment par le protocole sanitaire mis à jour par le Ministère, la DGT préconise la recherche de solutions dans le cadre du dialogue social de l’entreprise. Elle rappelle néanmoins que, « dans les situations de risque avéré et de non-respect des principes généraux de prévention, l’agent de contrôle utilisera l’outil juridique le plus approprié et le cas échéant une mise en demeure du DIRECCTE pourra être notifiée à l’employeur ».

Qu’est-ce que l’état d’urgence sanitaire ?

En commission mixte paritaire du 22 mars 2020, le Parlement a modifié et adopté le projet de loi d’urgence pour faire face à l’épidémie de covid-19, suite à une procédure accélérée. Ce texte définit notamment l’état d’urgence sanitaire. Me Alexandre FRECH, avocat collaborateur au sein de Lusis Avocats décrypte pour vous les nouvelles dispositions.

Le projet de loi comprend trois grands volets, avec des dispositions électorales, des dispositions venant préciser l’état d’urgence sanitaire et 10 pages de dispositions portant mesure d’urgence économique et d’adaptation à la lutte contre l’épidémie de covid-19 (voir à ce titre notre article : « Les mesures économiques de la Loi d’urgence covid-19« ). 

Il convient donc de définir ce qu’est l’état d’urgence sanitaire et ce qu’il permet afin de comprendre les mesures prises par le gouvernement. 

La loi permet un changement de dénomination. Si le code de la santé publique parlait auparavant de Menaces sanitaires grave, l’on parlera désormais de Menaces et crises sanitaires graves, avec un chapitre 1er troquant un sobre Mesures d’urgence contre un plus large Menaces sanitaires. 

Un nouveau chapitre 1er bis vient préciser ce qu’est l’état d’urgence sanitaire. Il convient de mentionner que ce Chapitre 1er bis est assorti d’une date de péremption : le 1er avril 2021. 

1. Définition de l’état d’urgence sanitaire 

Tout d’abord, il peut être déclaré sur tout le territoire français (COM et Nouvelle-Calédonie inclus) en cas de catastrophe sanitaire mettant en péril, par sa nature et sa gravité, la santé de la population. 

Il est déclaré par décret en conseil des ministres pris sur le rapport du ministre de la Santé. Ce décret doit être motivé, notamment par les données scientifiques ayant fondé cette décision, et définir les circonscriptions territoriales visées. L’Assemblée nationale et le Sénat sont alors informés, sans délais, des mesures prises par le Gouvernement. Le Parlement pourra alors requérir toute information complémentaire afin de contrôler et évaluer les mesures. 

L’état d’urgence sanitaire est limité à 1 mois. Toute prolongation nécessiterait le recours à la loi, après avis d’un comité de scientifiques spécifique. Pour autant, le gouvernement pourra y mettre fin par simple décret en conseil des ministres avant l’expiration du délai fixé par la loi de prorogation. Cela aura pour effet de mettre un terme à toutes les mesures prises en application de l’état d’urgence. 

Pour autant, l’état d’urgence sanitaire concernant le covid-19 est déclaré, par dérogation aux mesures mentionnées par la Loi, pour une durée de 2 mois à compter de l’entrée en vigueur de la Loi. Il concerne cette fois-ci l’ensemble du territoire national. 

2. Les pouvoirs dévolus aux organes de réaction à l’urgence sanitaire 

     A. Les pouvoirs de décision du Premier ministre 

L’état d’urgence sanitaire confère des pouvoirs au Premier ministre afin de garantir la santé publique, qui peut, par décret réglementaire pris sur le rapport du ministre de la Santé : 

  • Restreindre ou interdire la circulation des personnes et véhicules dans les lieux et aux heures fixés ; 
  • Interdire aux personnes de sortir de leur domicile, sous réserve des déplacements justifiés par des besoins familiaux, professionnels ou de santé impérieux ; 
  • Ordonner des mesures de mise en quarantaine des personnes susceptibles d’être affectées ; 
  • Ordonner des mesures de placement et de maintien en isolement à leur domicile ou tout autre lieu d’hébergement adapté des personnes susceptibles d’être affectées ; 
  • Ordonner la fermeture provisoire d’une ou plusieurs catégories d’établissements recevant du public, à l’exception de ceux fournissant des biens et services essentiels aux besoins de la population ; 
  • Limiter ou interdire les rassemblements sur la voie publique ainsi que les réunions de toute nature ; 
  • Ordonner la réquisition de tous biens et services nécessaires à la lutte contre la catastrophe sanitaire ainsi que de toute personne nécessaire au fonctionnement de ces services ou à l’usage de ces biens ; 
  • Prendre des mesures temporaires de contrôle des prix de certains produits rendues nécessaires pour prévenir ou corriger les tensions sur le marché, en informant le Conseil national de la consommation ; 
  • Prendre toute mesure permettant la mise à disposition des patients de médicaments appropriés pour l’éradication de l’épidémie ; 
  • Prendre toute autre mesure générale nécessaire limitant la liberté d’aller et venir, la liberté d’entreprendre et la liberté de réunion, dans la seule finalité de mettre fin à la catastrophe sanitaire. 

Ces mesures doivent être strictement proportionnées aux risques sanitaires encourus et appropriées aux circonstances. 

     B. Les pouvoirs de décision du ministre de la Santé 

Les pouvoirs du ministre de la Santé en cas d’urgence sanitaire sont aussi étendus : il peut désormais prendre des mesures non seulement pendant la menace sanitaire, mais aussi ensuite, afin d’assurer la disparition durable de la situation de crise sanitaire. 

Parmi ces mesures, la réquisition des personnels et établissement de santé est maintenue, avec une précision quant à l’indemnisation (désormais régie directement par le Code de la défense) ainsi que la réparation du préjudice subi (désormais applicable sans distinction aux personnels mobilisés et aux personnels bénévoles). 

De même, le ministre de la Santé peut prescrire toute mesure réglementaire relative à l’organisation et au fonctionnement du dispositif de santé (à l’exception de celles réservées au Premier ministre) afin de mettre un terme à la catastrophe sanitaire. Il peut aussi prescrire toute mesure individuelle nécessaire à l’application des mesures prescrites par le Premier ministre. 

     C. Pouvoirs d’application du Préfet et sanctions des contrevenants 

Les mesures prises par le ministre de la Santé et le Premier ministre peuvent donner lieu à une habilitation du Préfet à prendre toute mesure d’application, avec une information sans délai du procureur de la République territorialement compétent. 

Mais la loi confère aussi un grand pouvoir aux Préfets : en effet, si les mesures ne concernent qu’un département, le Préfet peut être habilité à les décider lui-même, après avis du directeur régional de l’agence régionale de santé et sur information sans délai du procureur de la République territorialement compétent. Ainsi, le Préfet peut être investi des pouvoirs du Premier ministre dans son département. 

Un éventail de sanction est aussi mis en place, ainsi : 

  • Contrevenir aux réquisitions est passible de 6 mois de prison et 10.000 € d’amende ; 
  • Contrevenir aux mesures individuelles et collectives est passible : 
    • d’une amende de la quatrième classe, soit 135 € ; 
    • d’une amende de la cinquième classe en cas de récidive dans les 15 jours, soit 1.500 € ; 
    • de 6 mois d’emprisonnement et d’une amende de 3.750 € ainsi que de peines complémentaire de travail d’intérêt général et de suspension du permis de conduire (jusqu’à 3 ans) en cas de récidive à plus de 3 reprises dans un délai de 30 jours. 

Ces contraventions peuvent bien entendu être constatées par procès-verbal établi par les forces de l’ordre, et notamment par la police municipale, les gardes champêtres, les agents de la ville de Paris chargés d’un service de police, les contrôleurs relevant du statut des administrations parisiennes et agents de surveillance de Paris. 

3. Le contrôle des mesures 

La Loi prévoit que le Parlement tient un rôle de contrôleur a posteriori des mesures mises en place par le gouvernement. Néanmoins, ce contrôle politique peut être assez limité lorsque la majorité est acquise au gouvernement. 

Aussi, le futur article L. 3131-25-1 du code de la santé publique prévoit que toute mesure individuelle prise en application de l’état d’urgence sanitaire pourra faire l’objet d’un recours devant le juge administratif, dans le cadre d’un référé visant la sauvegarde d’une liberté fondamentale. Le juge doit alors se prononcer dans un délai de 48h (et ce malgré l’état d’urgence sanitaire). 

De plus, un contrôle a priori devra être réalisé par un comité de scientifiques. Ce comité doit être réuni dès la déclaration de l’état d’urgence sanitaire (et dissous dès sa disparition) et comprend : 

  • Un Président nommé par le Président de la République, par décret ; 
  • Deux personnalités qualifiées nommées respectivement par le Président de l’Assemblée nationale et du Sénat ; 
  • Des personnalités qualifiées nommées par décret. 

Ce comité rend périodiquement des avis publics sur l’état de la crise sanitaire, les connaissances scientifiques qui s’y rapportent et les mesures propres à y mettre un terme ainsi que sur la durée de leur application. 

 

Coronavirus : quelles implications pour l’entreprise ?

Le Ministère du Travail a publié dans la journée du 28 février 2019 un Question/Réponse à l’attention des salariés et des employeurs disponible sur ce lien.

Vous n’avez pas pu le manquer, le coronavirus (ou Covid-19) défraie la chronique depuis quelques semaines. L’épidémie qui touchait initialement quelques lointaines contrées asiatiques est « désormais à nos portes », selon le nouveau ministre de la Santé, Olivier VERAN.

Des consignes très claires ont donc été données par l’Etat : toute personne revenant d’un voyage (personnel ou professionnel) dans une zone fortement touchée -pour l’heure la Chine continentale et le Nord de l’Italie- doit rester chez elle pendant une période de sûreté allant de 14 à 21 jours.

Mais si le site du ministère de la Santé est très clair sur les implications pour les personnes, pas un mot sur les entreprises !

Faisons le point.

  1. L’employeur a plus que jamais une obligation de sécurité de résultat

En tant qu’employeur, vous aviez bien avant l’épidémie l’obligation de protéger la santé de vos salariés, traduite dans la très juridique « obligation de sécurité de résultat ». Si la jurisprudence a pu affiner cette obligation au fil des années, et si l’on a même cru qu’elle deviendrait une simple obligation de moyens renforcée (voir notamment les commentaires de Soc, 22 octobre 2015, 14-10.173), cette importante mission trouve bien entendu toute son importance en cas d’épidémie.

En cas de doute sur la potentielle contamination d’un salarié, l’employeur a l’obligation -et pas seulement la possibilité- de renvoyer le salarié concerné chez lui. Cela participe de l’obligation de protéger le salarié (qui, s’il est contaminé, risque de ne pas être en état de travailler) et l’ensemble des autres salariés (afin d’empêcher qu’ils soient eux-mêmes contaminés).

De même, une circulaire de la Caisse Nationale d’Assurance Maladie du 19 février 2020 indique que les parents des enfants « mis en quarantaine » pourront eux aussi être renvoyés chez eux. Mesure de bon sens à la fois sanitaire et économique, on peut néanmoins se questionner sur le cas des conjoints, qui présentent eux aussi un risque de transmission…

Attention néanmoins à ne pas verser dans la décision de principe. Si l’action doit être rapide, elle ne doit jamais laisser subsister une quelconque différence de traitement ou discrimination. Ainsi, tout salarié présentant un risque (de retour de voyage ou simplement malade) doit rentrer chez lui, peu importe qu’il soit mandaté, dirigeant ou autre.

La seule présence du salarié sur le site présente un risque qui pourrait suffire à engager la responsabilité de l’employeur. C’est pourquoi, nous ne verrions aucune difficulté à ce que le salarié qui se présenterait sur son poste alors qu’il a été renvoyé chez lui s’expose à une sanction disciplinaire, son comportement mettant en danger sa santé et celle de ses collègues.

Enfin, pour les salariés qui resteraient sur site, il conviendra de fournir les informations et équipements adéquats. Vous pouvez d’ores et déjà multiplier les appels à une hygiène renforcée, encourageant vos salariés à se laver les mains régulièrement, à utiliser des mouchoirs à usage unique, éternuer dans leur coude, etc. De même, il faudra les inciter à signaler tout symptôme qui pourrait laisser penser à une contamination.

Puis, en cas d’aggravation de l’épidémie, les entreprises pourraient être amenées à fournir à leurs salariés de nouveaux types d’équipements de protection individuelle (gants, lunettes, masques, désinfectant, etc.), d’autant plus lorsque l’activité de l’entreprise nécessite de manipuler des objets provenant de zones fortement infectées. A ce titre, une véritable analyse des risques professionnels devra sans doute être menée, dans l’urgence.

  1. Renvoyer les salariés veut-il dire fermer l’entreprise ?

En l’espèce, et comme souvent, deux hypothèses sont envisageables : les salariés occupés à des postes nécessitant leur présence sur site et les autres.

Pour les premiers, il n’y a malheureusement aucune autre solution que de procéder à leur remplacement. En cela, vous pouvez d’ores et déjà considérer que votre salarié sera absent pendant au moins 14 jours, son contrat étant en « suspension forcée ». Il peut donc être possible de recourir selon les cas à un CDD ou à l’intérim afin d’y pallier. Attention, les modalités de conclusion restent les mêmes que pour tout remplacement, avec les mêmes points d’attention.

Pour les salariés dont les postes ne nécessitent pas leur présence sur site, la loi confère à l’employeur le droit de recourir au télétravail en cas de risque majeur. Il est donc possible d’imposer à vos salariés de travailler de chez eux. Mais là encore, il faudra prêter attention aux modalités de mise en place du télétravail (contrepartie, défraiement, prime spécifique, etc.), qui peuvent constituer un nouveau risque pour la Société.

Par ailleurs, il est possible que certains salariés invoquent leur « droit de retrait », face à un danger qu’il considèrent grave et imminent pour leur vie ou leur santé. Il conviendra alors de bien vérifier les situations au cas par cas : tout ne justifie pas de quitter son poste, il faudra que la situation soit véritablement problématique.

Il conviendra donc de faire preuve de pédagogie et de compréhension afin de vérifier si un risque existe effectivement et dans quelle mesure il pourra être évité afin de garantir la sécurité de tous dans l’entreprise.

  1. Finalement, qui paie la note ?

L’épidémie de coronavirus a des conséquences économiques indéniables.

Pour les salariés en « suspension forcée », un décret conjoint du Premier ministre et du ministre de la Santé prévoit depuis fin janvier une indemnisation par la Sécurité sociale. Malade ou pas, le salarié écarté serait indemnisé comme s’il était placé en maladie (mais sans délai de carence !). Pour cela, il convient que le salarié ait été placé en suspension forcée et « signalé » à l’Agence Régionale de Santé, dont le médecin est chargé de vérifier que « les conditions sont réunies » selon le décret et de transmettre un arrêt de travail à la Caisse.

Un flou existe cependant sur ce signalement.

Tout d’abord, est-ce à l’employeur, au salarié ou à la Caisse de signaler l’absence ? La Circulaire de la CNAM du 19 février 2020 semble indiquer que les salariés doivent prendre contact avec la CPAM… L’ARS quant à elle, nous a recommandé d’adresser un email sur l’adresse d’urgence des ARS avec les nom, prénom et numéro de sécurité sociale de chaque salarié concerné…

Aussi, sans plus d’instruction, rien n’indique pour l’heure les modalités exactes de délivrance du sésame qui permettra aux salariés d’être assurés de ne pas perdre 50% de leur salaire (14 jours d’arrêt) le mois prochain.

De plus, en théorie les salariés devraient être indemnisés, malades ou pas, pour la période de suspension forcée. Mais cela sera-t-il maintenu en cas en cas d’augmentation importante du nombre de salariés suspendus pour ce motif sui generis ? L’ARS et/ou la Caisse pourraient alors devenir regardantes sur le véritable motif de suspension et refuser de prendre en charge des suspensions « d’opportunité ». Personne ne dit qui, dans pareille situation, devra régler la facture, et cela risque de poser des difficultés, aux employeurs, à leurs salariés, comme à la Caisse !

De même, personne ne dit qui devra rémunérer le salarié si le médecin s’aperçoit que les « conditions » de suspension forcée n’étaient en réalité pas réunies ?

Encore, les entrepreneurs eux-mêmes étant désormais tous assurés au régime général, ils devraient avoir droit, eux aussi, à une indemnisation… bien qu’aucun texte officiel ne le mentionne clairement.

Enfin, dernier grand flou, aucune information n’a filtré sur de potentielles mesures d’accompagnement des entreprises. Le ministère de l’Economie, contacté ce matin, ne laisse filtrer aucune information. Car pour l’heure, personne ne parle des conséquences économiques qu’aurait une véritable « crise du coronavirus » sur les entreprises qui devraient baisser le rideau ou passer en « activité partielle » -sinon de manière macro-économique, en pourcentage du PIB-. Les effets pour bon nombre d’entre elles pourrait pourtant être (très) importants, y compris en matière d’emploi.

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RISQUES PSYCHOSOCIAUX EN CAS D’OPERATION DE RESTRUCTURATION : QUEL JUGE COMPETENT?

Le juge judiciaire est compétent pour suspendre une opération de restructuration assortie d’un PSE générant des risques psychosociaux sur le fondement d’un manquement à l’obligation de sécurité.

Depuis la loi de sécurisation de l’emploi du 14 juin 2013, le juge administratif a compétence pour trancher les litiges relatifs à la procédure d’élaboration du PSE et son contenu.

Le juge judiciaire, pour sa part, reste compétent pour statuer sur toute question ne relevant pas du « bloc de compétence » du juge administratif, délimité par les articles L.1233-57-2 et L.1235-7-1 du code du travail ; On parle de la compétence résiduelle du juge judiciaire.

Dans un arrêt du 14 novembre 2019 (n°18-13.887), la Cour de cassation juge pour la première fois que le juge judiciaire est compétent pour examiner une demande de suspension du déploiement d’un projet de réorganisation ayant donné lieu à un PSE validé par l’administration.

Dans cette affaire, un CHSCT a saisi en référé le TGI afin de d’obtenir la suspension de la mise en œuvre d’un projet de réorganisation au motif qu’il était générateur de risques psychosociaux.

L’employeur soutenait que l’opération de réorganisation incluait un PSE validé par l’administratif, de sorte que l’appréciation d’éventuels manquements à son obligation de sécurité, commis dans la mise en œuvre du PSE, relevait du contrôle du juge administratif, et non du juge judiciaire.

Constatant que les conséquences du PSE sur la santé et la sécurité ne figurent pas dans les articles délimitant le bloc de compétence du juge administratif, la Cour de cassation donne tort à l’employeur et conclut que le juge judiciaire reste compétent pour exercer ce contrôle.

Cet arrêt appelle donc à la plus grande prudence lors de la mise en œuvre d’un projet de réorganisation s’agissant d’éventuels risques psychosociaux, la validation par le DIRECCTE ne garantissant pas l’employeur contre une action ultérieure devant le juge judiciaire afin de faire suspendre le déploiement d’un PSE en raison de manquements à la sécurité consécutifs à sa mise en œuvre.

RECONDUCTION EN 2020 DE LA PRIME DE LA PRIME EXCEPTIONNELLE DE POUVOIR D’ACHAT

La prime exceptionnelle de pouvoir d’achat serait reconduite en 2020.

Projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2020.

 

Notre commentaire :

Instaurée par la loi du 24 décembre 2018 portant mesures d’urgence économiques et sociales, le dispositif de prime exceptionnelle de pouvoir d’achat sera, selon le projet de loi de financement de la sécurité sociale, reconduit pour l’année à venir, sous réserve de quelques modifications.

  • Contrairement à la première mouture de ce dispositif, le bénéfice des exonérations sociales et fiscales sera conditionné à la mise en place, préalablement au versement de la prime, d’un accord d’intéressement. En cohérence avec cette nouvelle condition, la prime exceptionnelle de pouvoir d’achat devra être versée entre le 1er janvier 2020 et le 30 juin 2020.

Il est également prévu que les accords d’intéressement qui seront conclus au cours de cette même période pourraient, de manière dérogatoire, « porter sur une durée inférieure à trois ans, sans pouvoir être inférieur à un an ».

  • De plus, le projet de loi introduit une nouvelle condition au bénéfice des exonérations fiscales et sociales : la prime devra bénéficier aux intérimaires mis à la disposition de l’entreprise utilisatrice.

A ce titre, le projet de loi prévoit expressément que lorsqu’une entreprise utilisatrice attribue à ses salariés la prime exceptionnelle de pouvoir d’achat, elle en informera l’entreprise de travail temporaire dont relèvent les salariés mis à sa disposition : l’entreprise de travail temporaire versera alors ladite prime à l’intérimaire selon les conditions fixées au sein de l’entreprise utilisatrice.

  • Les autres conditions retenues pour bénéficier des exonérations sociales et fiscales sont similaires à celles prévues par l’ancien dispositif :
  • Le montant de la prime, l’éventuel plafond de rémunération au-delà duquel les salariés ne bénéficieraient pas de la prime, ainsi que la modulation de son niveau entre les bénéficiaires devront faire l’objet d’un accord d’entreprise conclu selon les modalités afférentes à l’accord d’intéressement – ou d’une décision unilatérale de l’employeur après information du CSE ;
  • La prime sera d’un montant d’au plus 1.000 € par bénéficiaire ;
  • Elle devra bénéficier aux salariés ayant perçu, au cours des 12 derniers mois précédant son versement, une rémunération inférieure à trois fois le SMIC ;
  • Le principe de non substitution sera maintenu ;

Le montant de la prime exceptionnelle de pouvoir d’achat pourra être modulé selon les différents bénéficiaires en fonction de critères tels que la rémunération, le niveau de classification, la durée de présence effective pendant l’année 2018.

POUVOIR D’ACTION DE L’EXPERT DU CSE

Le recours de l’expert désigné par un comité d’entreprise (ou CSE) dans le cadre d’un plan de sauvegarde de l’emploi pour obtenir des documents estimés manquants.

Conseil d’Etat 25 septembre 2019 (n°428510)

Le Conseil d’Etat clarifie les voies de recours ouvertes à l’expert du Comité d’Entreprise (désormais Comité Social et Economique) désigné dans le cadre d’une procédure de plan de sauvegarde de l’emploi, lorsqu’un employeur ne lui transmet pas les pièces dont il sollicite la communication.

En l’occurrence, un expert  saisissait  le Tribunal Administratif dans le cadre d’une procédure en référé, pour obtenir la communication des éléments estimés manquants. Par ordonnance du 12 février 2019, le Tribunal Administratif de Montreuil se déclare incompétent pour connaître de cette demande.

Dans son arrêt du 25 septembre 2019, le Conseil d’Etat annule, dans un premier temps, cette ordonnance, estimant que le contentieux initié par l’expert relève bien de la compétence du juge administratif. Dans un second temps, il rejette la demande de l’expert, en s’appuyant sur les articles L.1233-57-5 et L.1235-7-1 du Code du travail, qui prévoient :

  • Pour le premier, que « toute demande tendant, avant transmission de la demande de validation ou d’homologation, à ce qu’il soit enjoint à l’employeur de fournir les éléments d’information relatifs à la procédure en cours ou de se conformer à une règle de procédure prévue par les textes législatifs, les conventions collectives ou un accord collectif est adressée à l’autorité administrative» ;
  • Pour le second, que l’accord collectif ou le document unilatéral portant PSE, le contenu du plan, les décisions prises par l’administration au titre de l’article L. 1233-57-5 précité et la régularité de la procédure de licenciement collectif ne peuvent faire l’objet d’un litige distinct de celui relatif à la décision de validation ou d’homologation du plan.

Le Conseil d’Etat  déduit de la lecture combinée de ces deux textes qu’une demande tendant à ce qu’il soit enjoint à l’employeur de communiquer des pièces à l’expert-comptable désigné ne peut être adressée qu’à l’autorité administrative et ne peut faire l’objet d’un litige distinct du litige relatif à la décision de validation ou d’homologation du plan. Tel n’est pas le cas en l’espèce, puisque l’action de l’expert avait précédé la décision d’homologation ou de validation du plan.

La portée de cette décision  est toutefois limitée au contexte spécifique d’une expertise diligentée dans le cadre d’un projet de licenciement économique avec mise en place d’un PSE.

PROLONGATION DE LA PERIODE D’ESSAI ET JRTT

PROLONGATION DE LA PERIODE D’ESSAI ET JRTT

La durée de la période d’essai est prolongée en raison de la prise de jours de RTT d’une durée égale à celle de l’absence du salarié.

La durée de la prolongation de l’essai n’est pas limitée aux seuls jours ouvrables.

Cour de Cassation, Chambre sociale, 11 septembre 2019, n°17-21.976

« Mais attendu que la période d’essai ayant pour but de permettre l’appréciation des qualités du salarié, celle-ci est prolongée du temps d’absence du salarié, tel que celui résultant de la prise de jours de récupération du temps de travail ; qu’en l’absence de dispositions conventionnelles ou contractuelles contraires, la durée de la prolongation de l’essai ne peut être limitée aux seuls jours ouvrables inclus dans la période ayant justifié cette prolongation ; »

Notre commentaire :

La période d’essai permet à l’employeur d’évaluer les compétences du salarié et au salarié, d’apprécier si les fonctions occupées lui conviennent (art. L. 1221-20 du Code du travail).

  • De jurisprudence constante, l’absence du salarié prolonge la période d’essai d’une durée égale à cette absence ( 31 mars 1994, n°90-40.204). Telle est la solution retenue dans cet arrêt par la Cour de cassation, lorsque la cause de l’absence du salarié est la prise de jours de récupération du temps de travail (RTT).

En l’espèce, la salariée considérait que les jours de RTT n’étant que la contrepartie d’heures de travail effectuées en sus de la durée légale de 35 heures, ils ne pouvaient pas s’analyser en des absences ayant pour effet une prolongation de la durée de la période d’essai. La cour de Cassation sanctionne ce raisonnement et étend au cas présent une solution d’ores et déjà retenue en cas d’absence en raison de congés payés, de congés sans solde (soc. 14 novembre 1990, n°87-42.795 ; soc. 23 mai 2007, n°06-41.338) ou d’un accident du travail (soc. 12 janvier 1993, n°88-44.572).

  • Sauf dispositions conventionnelles ou contractuelles contraires, la durée de la prolongation de la période d’essai ne peut pas être limitée aux seuls jours ouvrables inclus dans la période ayant justifié cette prolongation.

Dans son arrêt du 11 septembre 2019, la Chambre sociale confirme sa position cette fois, concernant l’incidence de la prise de jours de RTT sur la durée de la période d’essai et en tire deux enseignements :

Elle censure d’abord le raisonnement de la salariée ayant réalisé un décompte des jours d’absence en jours ouvrés, puis un calcul de la prolongation de l’essai en jours calendaires. En effet, les mêmes modalités de calcul (calendaires, ouvrables ou ouvrés) doivent être retenues, d’une part pour décompter l’absence du salarié pendant la période d’essai et d’autre part pour calculer la durée de la prolongation de l’essai.

Elle rappelle ensuite que lors d’une absence de 5 jours ouvrés continus au cours de la même semaine civile, le décompte et la prolongation de la période d’essai sont effectués en jours calendaires. En pratique, le décompte en jours calendaires des absences puis de la durée de la prolongation de l’essai qui en résulte, doit donc être privilégié, quelle que soit la nature de l’absence intervenue.

Une promesse d’embauche qui ne précise pas la rémunération du salarié, ni sa date d’embauche, n’est ni une promesse unilatérale de contrat de travail, ni une offre de contrat de travail

Cass. soc., 28 novembre 2018 n°17-20.782

La Cour de cassation précise plus avant sa jurisprudence relative à la distinction entre une promesse unilatérale de contrat de travail et une offre de contrat travail.

Depuis un arrêt du 21 septembre 2017, la Cour de cassation distingue l’offre de contrat de travail, laquelle peut engager la responsabilité extracontractuelle de l’employeur en cas de rétractation avant l’acceptation, de la promesse unilatérale de contrat de travail dont la révocation avant acceptation s’analyse en licenciement.

Dans ce nouvel arrêt, la Cour indique que l’offre de contrat de travail comme la promesse unilatérale de contrat doivent préciser des éléments essentiels du contrat de travail.

Dès lors, une promesse d’embauche qui ne précise pas la rémunération du salarié, ni sa date d’embauche n’est ni une promesse unilatérale de contrat de travail, ni une offre de contrat de travail et l’employeur peut donc se rétracter sans risquer une condamnation à des dommages et intérêts.

En pratique, il convient donc d’être attentif aux mentions que contient la promesse, qui seules déterminent sa nature juridique ainsi que ses conséquences en cas de rétractation de l’employeur.

La représentativité des organisations syndicales – Cour de cassation

Cass. Soc. 4 juillet 2018, n°17-20.710 (lire l’intégralité)

Un syndicat absent aux dernières élections professionnelles ne peut se prévaloir de la représentativité de la confédération à laquelle il s’est affilié en cours de cycle électoral.

La Cour de cassation rappelle que la représentativité des organisations syndicales est établie pour toute la durée du cycle électoral et précise ainsi qu’elle ne peut être reconnue en cours de cycle lorsque le syndicat n’a pas participé aux dernières élections.

En l’espèce, le syndicat CGT NAM avait désigné des délégués syndicaux au sein de l’UES NATIXIS. Le tribunal d’instance annule les désignations, retenant que :

  • Le syndicat CGT NAM avait été créé deux ans après les dernières élections professionnelles.
  • Il n’avait pas participé à ces élections ;

En cassation, le syndicat se défend en arguant du fait qu’au jour des désignations, il était affilié à une confédération et pouvait ainsi se prévaloir de sa représentativité. Il ajoute qu’il est seul syndicat de l’UES à disposer d’une section syndicale CGT.

La Cour de cassation rejette le pourvoi et approuve ainsi l’annulation des désignations.

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